La plupart des photographes de studio connaissent déjà la technique d’éclairage avec plusieurs flashes. C’est un peu la base pour eux. Mais quand on s’adresse à des photographes de nature, ou animaliers, l’éclairage au flash est souvent regardé comme une hérésie. Il faut dire que shooter avec un flash dans l’axe revient à écraser le sujet avec une lumière bien crue. Le photographe animalier a pris l’habitude d’éviter cela autant que la lumière de midi. Cela donne des images qui ne sont ni naturelles ni agréables.
Mais il est possible de créer des images très agréables à condition d’accepter les contraintes d’une technique souvent ignorée : le multiflash. Mieux, pour certains sujets rapides, le flash est absolument nécessaire pour figer le mouvement ; il faut donc le rendre plus élégant, plus discret et plus apte à embellir le sujet.
Par exemple : les colibris. Impossible de figer des ailes qui battent entre 20 et 80 fois par seconde. Même le 1/8000s reste largement insuffisant si l’aile n’est pas immobile en position haute ou basse. Mais si un bon gros coup de flash résout le problème, nous voilà avec une image écrasée de lumière, avec des ombres très bien alignées sur l’axe optique de l’éclairage. Solution : plusieurs flashes (d’où le nom de multiflash).
De fait, l’utilisation de plusieurs flashes n’est pas si simple, comme le photographe de studio le sait bien. Mais on découvre vite qu’il s’agit de gérer un équilibre que l’on peut (trop) vite résumer par :
- Offrir une illumination proche d’un éclairage naturel
- Eviter les ombres grossières en les éclairant
- Fournir un écrin qui mette le sujet en valeur
Ce sont les trois axes que je me propose de balayer ici. Cela ne fera pas de chaque photographe un expert. Mais cela offre de la place pour une expérimentation plus ordonnée qui mènera rapidement à trouver ses propres paramètres.
Conditions préliminaires
Un élément assez critique dans la mise en oeuvre de cette technique provient de l’ambiance générale. On oublie trop souvent que pour pratiquer simplement le flash en lumière naturelle, il faut partir d’une ambiance naturelle suffisamment… sombre.
Donc, même dans la nature, il faut s’installer à l’ombre. Un toit, un auvent, un arbre dense, une forêt. Tout est bon. Mais on voudra travailler avec un éclairage au flash relativement doux (les flashes seront réglés sur 1/32 de puissance, ou même beaucoup moins). Il faut donc que l’ambiance naturelle soit franchement trop sombre pour prendre la photo. Autrement, on risque de trouver des images « dédoublées » particulièrement disgracieuses.
Dans le cas de photographie de colibris, les perchoirs à utiliser seront placés à l’ombre, sous un arbre ou même franchement en forêt.
Eclairage naturel
Le premier objectif à atteindre est un éclairage qui malgré ses sources électroniques doit restituer une ambiance relativement naturelle. Pour cela, il faut prévoir des sources de lumière plutôt au dessus du modèle (le soleil est… dans le ciel).
Eviter un gros éclairage par en dessous. La photo semblerait bizarrement déséquilibrée.
Alléger les ombres
Mais comme un flash produit une lumière souvent très dure, il est recommandé de compenser la source principale par des sources secondaires plus douces pour éclaircir des ombres portées (plutôt en dessous ou à l’opposé de la source principale).
Vous pouvez être tenté d’utiliser des réflecteurs et des sources adoucies par des objets comme les parapluies de studio. Le gros problème reste que la présence d’un flash (souvent noir) est déjà source de perturbation des comportements animaux. Déployer un réflecteur d’un mètre (ou plus) et des parapluies de studio revient à assurer l’absence de sujet. Il y a déjà bien des environnements qui n’accepteront pas la présence des flashes avec leur support. Il faudra parfois installer l’éclairage à l’avance pour laisser la faune s’y accoutumer avant de pouvoir faire des photos.
Mise en valeur du sujet
Cela commence par le fond. Vous aurez plusieurs options à votre disposition avec plusieurs approches d’éclairage.
- Fond naturel : prévoir un flash suffisamment puissant pour fournir de la lumière aux plantes – à condition qu’elles ne soient pas trop loin. Soignez la présentation pour obtenir un fond agréable.
- Fond dessiné : il est beaucoup plus facile de suspendre un fond (dans le cas d’un colibri, la taille est rarement un problème ; c’est sans doute sans espoir pour un éléphant sauvage). Tout est possible sur les teintes et les couleurs ; mais n’exagérez pas. Il est souvent mieux de faire avec moins (de détails), moins (de couleurs artificielles), plus (de flou).
- Fond noir ou sombre : si le fond est loin, pas éclairé ou dans l’ombre, vous obtiendrez un arrière-plan très sombre qui peut mettre en valeur le plumage d’un colibri.
Les paramètres de l’appareil et des flashes
Finalement, venons-en à l’appareil photo lui-même.
- Mode manuel obligatoire.
- ISO 400
- Vitesse : synchro-X ou 1/200 (on travaille au flash !)
- Ouverture : le flash va figer le modèle ; autant avoir des détails et fermer le diaphragme également. f/16 est une bonne base.
Mais, de fait, il sera possible de faire varier légèrement l’ouverture (ou les ISO) pour s’assurer d’avoir la parfaite exposition (sans toucher à la vitesse qui n’a pas d’influence quand on utilise le flash).
Les flashes seront réglés entre 1/16 de puissance et 1/128 de puissance, afin de leur permettre de se recharger rapidement (une courte rafale de 3 ou 4 images ne doit pas être interrompue par la recharge des flashes).
L’équilibre entre les différents éclairage est une combinaison de la distance de chaque flash au sujet (elle réduit la quantité de lumière) et de sa puissance. 1/16 pour éclairer franchement. 1/64 pour déboucher les ombres. Tout cela étant combiné à la distance.
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Le flash sur l’appareil photo (voir ci-dessus) sert de Pilote pour commander tous les Suiveurs. Généralement, il faut utiliser la fonction Wireless de ces flashes. Mais il y a de nombreux équipements qui fonctionnent encore plus simplement : les flashes supplémentaires se contentent de déclencher quand ils « voient » le coup de flash principal. Pas de complication technique.
Un article très précis de Nate Chappell (Multi-flash Hummingbird Photography) est alors une lecture vivement recommandée. Non seulement Nate est un photographe qui a rodé sa technique, mais il la partage depuis longtemps et il anime une agence de voyage spécialisée qui propose des ateliers de photographie sur les oiseaux (souvent sur les continents américains). Vous remarquerez qu’il utilise des flashes Nikon SB-26 qui sont relativement puissants, pas trop chers et faciles à configurer en synchronisation avec n’importe quel autre flash du marché (y compris les micro-flashes intégrés à certains appareils photo).
Cet article est certainement trop court pour tout expliquer. Il laisse encore beaucoup de place à l’expérimentation. Mais j’espère qu’il vous permettra de vous lancer dans la photographie multiflash sur des colibris (absents en Europe) ou sur des mésanges (courantes en France) ou tout autre sujet animalier.
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